Interpellation du 18 décembre 2017
Koekelberg,
commune hospitalière – Interpellation citoyenne du 18 décembre 2017
Monsieur
le Bourgmestre,
Mesdames
et Messieurs les échevins,
Mesdames
et Messieurs les membres du Conseil communal,
Nous
sommes quelques habitants fiers de résider dans une commune dont la devise est
que chacun s’y sent chez soi. Mais nous nous sentons interpellés par la façon
dont les migrants sont reçus dans notre pays.
Ces
personnes fuient les guerres, les dictatures, les désordres liés à la crise
financière mondiale et aux changements
climatiques, pour aboutir dans notre pays, notre ville, notre commune, démunis
et sans papier. Elles doivent affronter la solitude, le dénuement et le
déracinement culturel. Elles représentent des proies faciles pour les marchands
de sommeil et les employeurs peu scrupuleux. Elles se heurtent à une série de
difficultés administratives et doivent faire face à bon nombre de préjugés..
Nous
savons que les compétences en matière d’entrée, de séjour et d’éloignement des
étrangers sont fédérales. Et que l’intégration est une compétence régionale.
Néanmoins, nous pensons que les collectivités locales sont un acteur-clé de
l’accueil, de l’hospitalité et du respect des droits des migrants. Les communes
peuvent créer un cadre qui permet de sensibiliser leur population et
d’améliorer l’accueil et le séjour des migrants qui résident ou transitent par
leur territoire.
Nous pensons par exemple aux
leviers suivants :
- Sensibiliser
et former le personnel communal à communiquer
une information correcte et spontanée sur les procédures relatives au droit
des étrangers ;
- Diminuer
les obstacles à l’obtention de la carte d’aide médicale d’urgence (AMU) via la
mise en place d’un système de tiers payant pour la première consultation. Le
coût de cette 1ère consultation représente en effet une barrière
réelle à l’accès aux soins ;
- Favoriser
l’intégration scolaire des primo-arrivants en organisant dans les écoles
communales des classes passerelles axées sur l’acquisition de la langue
d’enseignement et la remise à niveau. Ces classes sont des vecteurs d’émancipation par
l’éducation ; or, elles sont trop peu
nombreuses dans le Nord-Ouest de Bruxelles.
Il existe une série d’autres
leviers qui sont détaillés dans la motion proposée en annexe.
Notre
interpellation d’aujourd’hui s’inscrit dans le cadre de la campagne
« Commune hospitalière » menée à l’échelle de la Fédération
Wallonie-Bruxelles par le CNCD, l’organisateur de 11-11-11. Le but de cette
campagne est d’amener les communes à voter une motion dans laquelle elles
s’engagent concrètement pour améliorer la situation des migrants présents sur
leur territoire. Plusieurs communes se sont déjà engagées dans cette voie et
une dizaine d’autres ont été interpellées.
Les migrants
– quel que soit leur statut de séjour (demandeurs d’asile, réfugiés ou sans
papiers) – doivent être considérés comme des citoyens à part entière et pouvoir
jouir de leurs droits afin de participer pleinement à la vie locale. Notre
commune a intérêt à favoriser l’intégration d’une population jeune, motivée par
la recherche d’un emploi stable et d’un logement décent.
C’est
pourquoi nous demandons au conseil de s’engager, en votant une motion forte, dans une politique d’ouverture, d’accueil et de
respect des droits humains. Nous vous demandons de déclarer Koekelberg comme
étant une commune hospitalière.
Annexe
à l’interpellation citoyenne du 18 décembre 2017
Voici le texte proposé à l’adoption :
Le
Conseil communal,
-
Vu les
engagements européens et internationaux pris par la Belgique pour le respect
des droits fondamentaux des personnes et en particulier des plus vulnérables
(Déclaration universelle des droits de l'homme, Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme, Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels, ...)
-
Vu les
engagements pris par la Belgique en matière de protection des réfugiés dans le
cadre de la Convention de Genève de 1951, vu les engagements de la Belgique
pris en matière de relocalisations et de réinstallations,
-
Vu
l'article 23 de la Constitution belge garantissant à chacun le droit de mener
une vie conforme à la dignité humaine et de jouir de droits économiques,
sociaux et culturels
-
Considérant
que l’Europe et le monde traverse une période où les migrants sont de plus en
plus considérés comme des menaces pour nos sociétés, où les réponses politiques
choisissent d’ériger des murs plutôt que des ponts, où les naufrages en
méditerranée augmentent d’année en année, que des pays européens se retrouvent
seuls à faire face à l’accueil des migrants, que l’orientation en Europe
inquiète de nombreux citoyens qui y voient une régression de l’histoire et une
négation des valeurs qui ont fondé l’Europe d’après guerre,
-
Considérant
la multiplication des crises et la prolongation des conflits amenant des
femmes, des hommes et des enfants à prendre des routes migratoires de plus en
plus dangereuses, parfois au péril de leurs vies,
-
Considérant
que les migrations ont forgé le monde et continueront de le faire, qu’elles
soient choisies ou forcées - ou comme c’est souvent le cas - un peu des deux,
que les migrations peuvent constituer une chance et un potentiel pour nos
sociétés pour peu qu’une politique active d’accueil soit mise en place,
-
Considérant
que l’accueil des migrants n’est pas le seul fait des compétences fédérales,
que le vivre ensemble relève aussi de l’échelon le plus proche des citoyens que
constitue la commune, que c’est à cet échelon que la convivialité, la rencontre
peuvent se construire entre tous les citoyens d’une commune, que les communes
peuvent aussi faire la différence en prônant l’hospitalité au niveau local,
-
Considérant
que les communes – même dans un cadre restreint – ont une marge de manœuvre
pour permettre aux migrants d’être mieux accueillis et soutenus, quel que soit
leur statut
-
Considérant
que les institutions communales sont le premier échelon vers lequel les
citoyens se tournent, que la confiance tant dans la police que les services
administratifs est fondamentale pour le bien vivre ensemble, et qu'il faut
éviter une rupture de confiance qui empêcherait les services de fonctionner au
mieux qu'il s'agisse de la police, des écoles, des services communaux de
proximité,
-
Considérant
qu’un meilleur accueil peut faire la différence dans le parcours d’intégration
des migrants en leur donnant toutes les chances et leur permettant de faire
partie intégrante de la vie locale,
Sur
proposition du Collège Communal…..
ADOPTE le texte de la motion visant à déclarer Koekelberg
Commune Hospitalière
PREND la résolution ferme de respecter les droits fondamentaux des migrants présents
sur leur territoire,
S’ENGAGE à des actions concrètes
visant à :
SENSIBILISER la population sur les migrations et l’accueil de l’autre :
·
sensibiliser
et favoriser la formation des fonctionnaires communaux et des stewards aux
droits des étrangers, à la diversité et au respect de l’autre ;
·
promouvoir
dans les centres culturels communaux la diversité culturelle présente sur la
commune et la rencontre entre les populations ;
·
informer
les entreprises locales sur les droits des migrants et leur accès au marché du
travail, soutenir les entrepreneurs migrants et belges de PME ;
·
soutenir
les initiatives citoyennes, les bénévoles et les associations :
o
qui
viennent en aide aux étrangers et primo-arrivants de la commune ;
o
qui
visent à la déconstruction des préjugés à l'attention de tous les résidents de
la commune ;
AMELIORER l’accueil et le séjour des migrants
dans le respect des droits humains :
Organiser un accueil administratif de qualité pour les étrangers résidant dans la commune et les nouveaux arrivants en veillant aux aspects suivants
INFORMATION DE QUALITE
- organiser des moments d'information
sur les services/aides organisées dans la commune ;
- communiquer une information correcte
et spontanée sur les procédures de séjour, de mariage/cohabitation légale, de
regroupement familial, d’accès à la nationalité, sur les services existants au
sein de la commune et s’assurer que les étrangers comprennent les procédures ;
- faciliter l’utilisation de
l'interprétariat social pour les fonctionnaires de l’état civil, sans coût pour
le bénéficiaire ;
- délivrer une information claire et
précise concernant leurs droits (demande de régularisation, scolarité des
enfants, aide juridique, mariage, …) ;
RESPECT DES PROCEDURES ET DES DROITS
- veiller au respect des délais légaux
fixés (enquêtes de résidence, inscriptions au sein de la commune, transmission
des dossiers aux autres administrations (entre autres l’Office des étrangers)
et aux régions, délivrance des accusés de réception et annexes, renouvellement
des titres de séjour,…) ;
- appliquer la gratuité sur les
documents non soumis à une taxe fédérale, p. e. pour les demandeurs d’asile,
personnes sans revenus ou allocataires sociaux ;
- respecter les compétences communales
et ne pas exiger de conditions supplémentaires non prévues par la loi (par
exemple le certificat de coutume en cas de mariage, impossible à obtenir pour
certains pays d’origine …) ;
- être vigilant dans les procédures de
radiation et faciliter la procédure de réinscription par la commune ;
Soutenir l'intégration des migrants
- systématiser l’orientation vers -et
financer davantage via la Cohésion Sociale- les cours de Français/Néerlandais
Langue Etrangère ;
- donner une information complète sur
les parcours d'intégration ;
-
soutenir davantage l’intégration socio-professionnelle des migrants et
l’équivalence de leurs diplômes via les organismes communaux compétents
(missions locales, bureaux d’aide aux entrepreneurs) et orienter vers les
organismes régionaux compétents (VDAB, Actiris, FOREM et guichets
entreprise) ;
- délivrer une information claire
concernant la nationalité belge et veiller à la bonne compréhension de la
procédure par les intéressés ;
Accueillir de façon spécifique des demandeurs d’asile et des réfugiés
- dans le cadre de la transition de
l'aide matérielle vers l'aide financière, continuer à assurer un accompagnement
personnalisé et l’aide à la réinstallation ;
- accorder une attention spécifique
pour les MENA (mineurs étrangers non accompagnés) en leur assurant logement et
accueil approprié ;
- informer la population locale de la
possibilité de devenir tuteur pour les MENA ;
- favoriser l’intégration scolaire des
enfants réfugiés et des MENA en organisant dans les écoles communales de
classes passerelles (DASPA) ;
-
établir un suivi par la commune de la personne ayant fait une demande de
régularisation afin de l'épauler dans ses démarches administratives, logement,
moyen de subsistance ... ;
Respecter les droits fondamentaux des personnes sans papiers en veillant aux aspects suivants
LOGEMENT
- Sensibiliser les propriétaires de biens immobiliers
sur l’existence des agences immobilières sociales et sur la stabilité des
revenus des personnes bénéficiant de l’aide sociale ou du revenu d’intégration
sociale ;
SANTE & SCOLARITE
- Maintenir un accès de qualité pour
la carte d’aide médicale d’urgence (AMU) comme cela se fait actuellement ;
- Informer via le site web du CPAS,
entre autres, des procédures d’accès à l’AMU et mettre en place un système de
tiers payant pour la première consultation. Le coût de cette 1ère
consultation représente une barrière réelle à l’accès aux soins ;
- Maintenir l’accès à la culture et à
la pratique sportive pour les sans-papiers en facilitant leur inscription aux
bibliothèques et centres sportifs de la commune ;
RESPECT DES DROITS DES JUSTICIABLES
- Veiller à bien préciser les motifs
de convocation dans les courriers adressés par les communes aux sans papiers,
comme le rappelle l’arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme prononcé
dans son arrêt Conka contre la Belgique en 2002 ;
- Faire respecter l’article 15 de la
Constitution qui stipule le principe d’inviolabilité du domicile en ne
participant à aucune arrestation sans mandat du juge au domicile d’une personne
sans-papier, et éviter d’utiliser des procédés comme des ruses qui viseraient à
contourner le principe fondamental de l’inviolabilité du domicile ;
- Faire primer le statut des victimes
lors d’une plainte déposée par une personne sans-papier visant, par exemple,
des patrons abuseurs, des violences conjugales, des menaces etc. Cette attitude
doit ainsi permettre de construire une police de proximité dans laquelle tout
citoyen a confiance lorsqu’il veut dénoncer des infractions commises ;
- Ne pas participer à des
arrestations pour cause d’irrégularité de séjour de personnes sans papiers sur
le chemin de l'école ou aux abords des écoles, à la sortie des lieux de culte,
dans les transports publics, ou dans les lieux de regroupement où des services
sont offerts aux migrants (logement, distribution alimentaire, soins de
santé) ;
- Ne pas fonder les opérations de
contrôle d’identité sur base d’un profilage ethnique ;
- Ne pas permettre à la police
communale (sur ordre de l'OE) de procéder à l'arrestation de personnes ayant
fait la demande de regroupement familial et de bien respecter la non
arrestation des personnes se trouvant en procédure de regroupement familial
et/ou ayant un ou des enfants qui réside(nt) sur le territoire communal.
REFUSE tout
repli sur soi, amalgames et propos discriminatoires qui font des migrants des
‘boucs émissaires’ et enferment des milliers de personnes dans des zones de
non-droit ;
DEMANDE aux
autorités belges compétentes et concernées de remplir pleinement leurs
obligations européennes en matière de relocalisation et de réinstallation des
réfugiés et se déclare solidairedes communes en Europe ou ailleurs confrontées
à un accueil important de réfugiés ;
MARQUE sa ferme
opposition à toute forme de politique migratoire qui entraîne des violences et
des violations des droits humains des personnes migrantes.
Pour ces raisons, Koekelberg se déclare Commune Hospitalière.